1 Théophile, j'ai raconté dans le premier livre tout ce que Jésus a fait et enseigné
2 jusqu'au jour où, après avoir donné, par l'Esprit-Saint, ses ordres aux apôtres qu'il avait choisis, il fut enlevé (au ciel).
3 C'est à eux aussi qu'après sa passion il se montra vivant, avec force preuves, leur apparaissant pendant quarante jours et parlant des choses du royaume de Dieu.
Commentaires :
Quarante.
Le chiffre n’est pas neutre. Il renvoie aux quarante ans dans le
désert comme aux 40 jours d’Élie (1 Rois 19). Un temps de
préparation et de conversion. On se doute qu’il y a plus ici une
symbolique qu’un fait historique. D’ailleurs chez Jean, le don de
l’Esprit se fait plus vite. Les chemins de Luc sont propédeutiques.
Arrêtons-nous
peut-être sur ces 40 jours d’Élie. Dieu n’est pas favorable au
meurtre des prêtres de Baal (1 R 18), de même il n’est pas dans
le tonnerre et le feu, mais ailleurs, dans une symphonie plus douce
(1 R 19)… La tendresse de Dieu, nous glisse notamment Varone1
ne s’impose pas dans la foudre et le tonnerre, mais nécessite un
chemin d’humilité du prophète qui découvre qu’il n’est pas
seul, que sa voix doit se joindre au « reste », comme
au chœur des anges.
L’épisode
avec la veuve de Sarepta (1 Rois 17), où Élie est
recueilli et nourri par une vieille femme, n’a pas suffi à la
conversion de l’homme de Dieu. Il se croyait investi d’une
mission et sur le mont Carmel (1 Rois 18), il est retombé
dans son désir de puissance allant jusqu’à massacrer au nom de
Dieu les prophètes de Baal. Était-ce le désir de Dieu ? Ce
n’est qu’au bout du voyage que l’on comprend l’erreur d’Élie.
En effet, et c’est une constante de l’Ancien Testament, Dieu
n’oppose pas la violence à la violence. Il se tait. À l’exception
de l’ange qui arrête le bras d’Abraham, ou celui qui retient
Balaam, les récits dévoilent rarement le dessein véritable de
Dieu.
Le
chemin qui était tracé à Élie, n’était pas celui de la
violence et de la gloire. Au bout du voyage (1 Rois 19), il
a pris conscience, alors qu’il se croyait le seul et dernier juste,
que 7 x 1000 hommes étaient bénis (7 = plénitude, 1000 = grand
nombre2).
Alors ce Dieu qu’il croyait dans le feu, lui est apparu dans la
voix d’un fin silence3.
Commentaire
2 :
Revenons
à Actes 1. N’est-on pas là aussi devant des hommes qui rêvaient
de puissance et à qui le Ressuscité doit tracer un chemin autre ?
Celui de l’absence et de la kénose. Alors le chiffre 40 s’éclaire.
Il est invitation à une contemplation et une prise de recul sur le
travail discret de Dieu pour l’homme.
Commentaire
3 :
Et
nous ? Peut-être faut-il entendre, depuis l’affirmation du
cardinal de Smedt au Concile, que notre chemin n’est pas celui d’un
triomphalisme exubérant, mais bien celui de l’humilité, ce que
nous appelons la kénose. Ce n’est pas nous qui savons, c’est lui
qui « après sa passion [...] se montre vivant, avec force
preuves, [...] et parl[e] des choses du royaume de Dieu »
Pour nous, que veux dire ces 40 ans au désert. Serait-ce le temps qu'il nous faudra pour arriver au plein détachement. A 53 ans, je dois avouer que mes 40 ans de désert ne sont pas à leur terme...
1
François Varone, in Ce Dieu censé aimer la souffrance,
Apologique, Cerf, Paris, 1985, p. 27 à 44.
2
On n’est pas ici dans les 144.000 de l’Apocalypse (Ap. 7, 4),
mais dans ce que Varone (cf. ci-dessous) qualifie de « Reste »,
les priants anonymes, chercheurs de vérité.
3
Cf. l’excellente analyse de François Varone, in Ce Dieu censé
aimer la souffrance, Apologique, op. cit. ,p. 27 à 44 et nos
développements dans « L’Amphore et le Fleuve »
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